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Pour chacun des Trophées Tangente 2020, le jury a désigné un vainqueur ainsi que des mentions spéciales pour des travaux dignes d'être distingués. Le 18 décembre 2020 a eu lieu la remise des prix sous forme de Webinaire.
Découvrez le palmarès
Manu Houdart, professeur belge agrégé de mathématiques, a choisi dès 2003, parallèlement à son enseignement, de créer des associations, d'abord pour soutenir les élèves en difficulté, puis pour développer la vulgarisation des maths, avec en 2015, la « Maison des Maths » de Quaregnon. Il a pris, en 2011, la décision difficile de mettre en parenthèses sa carrière de professeur pour se consacrer à cette mission. En 2017, il quitte l'association après avoir obtenu le « Prix du Wallon de l'année » pour exploiter son talent de conteur dans le « One Math Show » qu'il crée sous le titre de « Very Math Trip ». Son livre se veut une extension de ce spectacle.
Contrairement à ce que pourrait faire penser le titre, le livre ne relate pas les conséquences d'une gueule de bois mais propose un périple parmi les mathématiques. Le choix des sujets est très classique, même si le calcul des probabilités s'y taille une part plus grande que dans la plupart des ouvrages de vulgarisation. En particulier, l'auteur décortique le paradoxe des anniversaires (vous pouvez parier sans grand risque de perdre que, dans une assemblée d'une quarantaine de personnes, deux ont la même date anniversaire).
L'originalité de Very Math Trip est plus dans le style, qui est celui d'un one-man-show, que dans le choix des sujets, même si celui-ci est judicieux. Manu Houdart a en effet choisi la scène et le one-« math »-show pour partager sa passion des mathématiques (pour connaître les dates et lieux des prochaines représentations : www.verymathtrip.com).
Un beau spectacle pour les étudiants et une leçon de communication scientifique pour leurs professeurs !
Note de lecture d'Hervé Lehning parue dans Tangente à retrouver sur le site tangente-mag.com avec plus de 300 autres notes.
Ce roman graphique aborde à bras le corps un sujet de société : la perception par le grand public de l'IA. Il présente les questions éthiques (l'anthropomorphisation, le sexisme, les transformations du rapport au travail...) soulevées par l'utilisation de ce nouvel outil. Un effort pédagogique pour expliciter les processus mathématiques en jeu dans le fonctionnement d'une IA est réalisé lors de pauses régulières dans le récit. On notera le graphisme, issu de la génération Manga, comme un point fort au service de la vulgarisation.
David Etien est dessinateur, Bertrand Escaich (né en 1973) et Caroline Roque (née en 1975) scénaristes sous le nom de Beka. Ils ont réalisé ensemble, aux Éditions Dupuis, unesérie de BD, Champignac,dont le tome 1, Enigma, est consacré à la machine à crypter Enigma.
C'est ce livre qui a été choisi par les lycéens.
Vous connaissez l'histoire d'Alan Turing, ce mathématicien britannique auteur d'avancées décisives dans le développement de l’informatique, incarné par Benedict Cumberbatch dans le film Imitation Game (Mortem Tyldum, 2014). Peut-être connaissez-vous également le comte de Champignac, personnage de bande dessinée et génial inventeur spécialisé dans l’étude des champignons, fidèle ami de Spirou et Fantasio. Ce que vous ignorez sûrement, c’est que les deux se connaissent !
Le comte a vécu bien d’autres aventures avant de faire la connaissance du plus célèbre groom du neuvième art. Dans le premier tome de ses aventures, on y découvre un Pacôme de Champignac sans un seul cheveu blanc, pas insensible aux charmes d'une collègue linguiste et… assistant d'Alan Turing à Bletchley Park, alors que celui-ci travaillait au décryptage des messages nazis pendant la Seconde Guerre mondiale !
Lui-même ancien élève de l'École normale supérieure, Emmanuel Arnaud raconte les méandres parfois comiques du raisonnement mathématique d'élèves de classes prépas.
L'action se déroule dans l'univers des « CPGE ». Laurent Kropst, élève en math'sup à Louis le-Grand, ne vit que par l'ambition de réussir par son mérite à intégrer l'une des écoles qui le feront accéder au sommet de l'ascenseur social. Le livre fait bien vivre l'ambiance de cette antichambre illustre des grandes écoles, ses rites, ses codes, son obsession du classement, et va même jusqu'à décrire quelques raisonnements mathématiques. Seuls les premiers iront dans une des « math'spé étoile » du lycée, étape naturelle vers Polytechnique ou Normale Sup. Les autres se reclasseront dans des lycées moins prestigieux, voire de banlieue.
Le jeune héros est prêt à de petites lâchetés pour y parvenir, certain qu'il est de son talent. Mais nul n'est à l'abri d'un accident, et tandis que le monde semble s'effondrer, d'autres alternatives se dévoilent, moins avouables. La relation avec une élève d'hypokhâgne du même lycée, nièce d'un député européen, lui fait entrevoir la face sombre de la Force qui mène à la même réussite. Un premier roman qui jette un regard implacable sur un système contesté mais efficace.
Métin Arditi,écrivain suisse, a été ingénieur en génie atomique. Il a enseigné à l'École polytechnique fédérale de Lausanne où il a créé la fondation Arditi (qui attribue une quinzaine de prix annuels).
Son livre raconte la rencontre d'un jeune autiste et d'un architecte passionné par les mathématiques.
Yannis, enfant grec de l'île de Kalamaki, passe son temps à mesurer le monde, à vérifier que tout est bien en ordre, en notant l'arrivée des bateaux de pêche dans le port, en comptant les clients du café Stamboulidis, les quantités de poissons pêchées par chaque bateau... Tout changement l'angoisse. Il plie des origamis pour rétablir l'équilibre lorsqu'il est rompu. Les nombres ont leur couleur, leur parfum, certains sont mauvais, d'autres bénéfiques.
Le jury n'a pas décerné de prix en 2020 mais il a décidé de récompenser par une mention spéciale deux programmes très intéressants que les jeunes auteurs ont su, malgré la conjoncture de l'année, mener à bien.
SneakyMath, par Romain Benoit et Natan Doubez
SneakyMath, est l'œuvre d'un groupe de deux élèves de terminale lors de sa conception, Natan Doubez et Romain Benoît. Ce projet est une version revisitée du très célèbre jeu Snake. Les auteurs ont eu l'idée originale de l'adapter au Prix Novelli en lui donnant un vernis mathématique. Il s'agit de calcul mental !
Dans cette version, le serpent peut aussi bien grandir que rapetisser ! Chaque fois que le serpent mange un chiffre sur la grille, sa taille varie (en plus ou en moins selon l'objet) de la valeur du chiffre. L'objectif est d'atteindre une taille définie par le programme en début de partie, il faut donc choisir habilement les chiffres que le serpent va engloutir et calculer rapidement : le serpent ne traine pas !
BoolQuest, est sorti de l'imagination fertile de Raphaël Fromentin, lycéen de première (aujourd'hui en terminale), qui avait déjà participé l'an dernier au Prix Novelli et avait remporté une mention pour son jeu VegeBattle.
Cette fois, c'est l'algèbre booléenne qui y est à l'honneur. Le but du jeu est de reproduire sur une grille composée de cases rouges et vertes la grille modèle présentée au-dessus en utilisant la fonction proposée pas le programme qui permet d'inverser la valeur des cases adjacentes à la case choisie et éventuellement y compris cette case.
Cet énoncé paraît très simple et c'est effectivement le cas dans les premiers niveaux ou une seule action permet de reconstituer la grille cible. Mais cela se complique vite quand plusieurs actions sont demandées, il devient alors difficile de visualiser les évolutions successives de la grille.
Le jury 2020 a choisi Frédéric André, professeur de mathématiques au lycée de La Salle à Alès (Gard), pour son article intitulé Homo Academicus dans son labyrinthe. Le texte, fort bien écrit, tire son inspiration d'une nouvelle, Le stratagème, issue d'un livre de Jorge Luis Borges, le Livre de sable ; il met en scène trois personnages, le premier devant recruter l'un des deux autres. Le choix fait appel à des raisonnements logiques et paradoxaux, une modélisation logique de la littérature qui a enchanté le jury.
Frédéric André a réalisé aussi récemment la traduction du livre de Terence Tao L'art de résoudre les problèmes de mathématiques (publié chez Cassini).
Une mention a été attribuée à Aurélie Alexandre, elle aussi enseignante (au collège Marcel Pagnol de Sérignan, dans l'Hérault) pour son article Algorithme d'Euclide et cætera. Partant du texte du savant grec traduit par Denis Henrion dans le succulent style de la Renaissance, l'auteure nous conduit à travers les siècles jusqu'aux applications actuelles de cette propriété des nombres. Son interview, en ligne sur tangente-mag.com, est publiée dans le numéro 55 de Tangente Éducation.